Aujourd’hui, voila quelques mois que je suis infirmière diplômée. Et voila, un peu plus d’un mois que je travaille dans un service que j’ai choisi.
Oh oui, ce service, je l’ai choisi et je me suis battue pour y travailler. J’ai fait un choix entre plusieurs possibilités d’avenir et j’ai décidé que je me formerais dans ce service et pas dans un autre.
J’aime ce service, Dieu sait que j’aime ce service. Mais voilà, cela fait un mois que je courre dans tous les sens. Un mois que je « rame ». Un mois que je rentre chez moi, lessivée. Ce n’est pas la spécialité qui est en cause, ni les patients et clairement pas l’équipe avec qui je travaille.
Non c’est un tout.
C’est le fait d’avoir l’impression de ne pas être à la hauteur.
C’est le fait de ne pas avoir le temps de boire, de manger ou simplement de se soulager.
C’est le fait de ne pas trouver le temps pour accompagner une crise de larmes.
C’est le fait d’avoir l’impression d’être une machine.
C’est le fait d’être tout le temps submergée d’informations, de consignes, etc..
Finalement, c’est juste le fait de ne pas avoir le temps de prendre le temps.
Aujourd’hui, un patient m’a dit que j’avais la chance de faire ce métier. D’aider les autres, de soulager les souffrances, de partager des moments de joie avec mes patients.
Il a raison. Quelque part, j’ai de la chance et ce métier, je l’ai choisi. Mais pas comme ça, pas dans ces conditions.
Ces tracas, ces difficultés, je les mets sur le compte de mon inexpérience et je me rassure en me disant que cela passera. Qu’avec le temps et l’expérience, j’aurais suffisamment de bouteille pour tout faire. Vite car l’hôpital va toujours vite mais surtout bien, car c’est la base de mon métier. J’essaye de me rassurer comme je peux car, je vois bien que les difficultés ne font que commencer.
Aujourd’hui, mes collègues de service étaient en grève. Pour se battre pour nos conditions de travail, pour la revalorisation de nos salaires, pour la reconnaissance de la pénibilité de notre travail et bien d’autres choses encore. Pour tout simplement, faire entendre notre voix.
Car nous travaillons avec des êtres humains et ceux que nous appelons « patient » sont vos proches et méritent que l’on puisse s’occuper d’eux au mieux.
Aujourd’hui, mes collègues étaient en grève comme des milliers d’autres pour faire entendre à la France et aux Français, le ras le bol des soignants.
Aujourd’hui, je n’étais pas en grève car je m’en sentais pas la légitimité et pourtant, je sais à quel point leur combat est le mien.